Entretien avec

DR Denis Prud’homme

Recteur et vice-chancelier

Le Dr Denis Prud’homme est devenu recteur et vice-chancelier de l’Université de Moncton le 1ᵉʳ juillet 2020. Il en prend les rênes en pleine période de pandémie mondiale qui en a accentué les défis financiers. Il a occupé plusieurs postes de cadre au cours de sa carrière et compte plus de 30 années d’expérience dans le milieu universitaire.

Nous l’avons rencontré en août dernier pour en découvrir un peu plus sur lui, sur ses objectifs et sur ses aspirations pour l’Université de Moncton.

Pourriez-vous tout d’abord nous tracer les grandes lignes de votre parcours professionnel ?

J’ai pratiqué plusieurs sports dans ma jeunesse, ce qui a développé chez moi un intérêt marqué pour l’activité physique. Ce penchant pour les sports m’a poussé à faire un baccalauréat et une maîtrise en sciences de l’activité physique à l’Université Laval. À l’époque, je m’intéressais non seulement aux bienfaits de l’activité sur la santé, mais aussi au rôle de l’activité physique comme traitement adjuvant pour soigner diverses maladies chroniques. Par la suite, j’ai poursuivi mes études en médecine, toujours à l’Université Laval, et effectué ma résidence en médecine générale à l’Hôtel-Dieu de Lévis. J’ai ensuite occupé le poste de professeur au programme de kinésiologie du Département de médecine sociale et préventive, et exercé la médecine du sport à la clinique du Pavillon de l’éducation physique et des sports de l’Université Laval.

Durant cette période, j’ai enseigné la kinésiologie et fait de la recherche clinique liée aux effets de l’exercice pour la prévention et le traitement des maladies chroniques, et aux effets des changements hormonaux qui surviennent naturellement à différentes phases de la vie sur la santé de la femme. De plus, j’ai travaillé avec plusieurs équipes sportives du Rouge et Or, avec des équipes canadiennes (patinage artistique et volleyball), avec les Nordiques de Québec et, enfin, j’ai eu la chance d’être médecin-chef de l’équipe médicale canadienne lors des Jeux de la Francophonie, tenus à Paris, en 1994. J’ai ensuite occupé les postes de directeur et de doyen associé de l’école de kinésiologie, de doyen de la Faculté des sciences de la santé pendant 10 ans, à l’Université d’Ottawa, et de vice-président associé à la recherche et directeur scientifique de l’Institut du Savoir Montfort.

Vous êtes médecin de formation et chercheur chevronné dans le monde médical. Qu’est-ce qui vous a donné le goût de gouverner l’Université de Moncton à cette étape de votre carrière ?

Lorsque j'étais étudiant, j’ai été choyé d’avoir d’excellents professeurs et leaders dans leur domaine d’expertise respectif. Je me souviens d’un commentaire de l’un de mes professeurs : « Si vous voulez influencer, changer ou améliorer des façons de faire, vous devez infiltrer le système, vous devez vous engager ! ». En gardant ces paroles en tête, je me suis dirigé en médecine pour faire la promotion de la pratique de l’activité physique comme moyen de prévention et de traitement des maladies chroniques, et j’ai été doyen dans l’objectif d’améliorer les programmes de formation des professionnels de la santé pour une meilleure prise en charge globale des patientes et patients. Enfin, le poste de recteur et vice-chancelier de l’Université me donne l’occasion, avec mes collègues et nos partenaires, de contribuer à la vitalité des communautés francophones au Nouveau-Brunswick, au Canada et à l’international.

Notre université se définit comme étant la plus humaine. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

J’ai toujours perçu l’Université de Moncton comme une université de taille humaine, en considérant sa population étudiante, le ratio étudiants-professeur et la taille du personnel administratif. Pour moi, une université humaine représente plus qu’un concept ou un slogan : c’est un savoir-être que nous devrions retrouver chez l’ensemble des membres de la communauté universitaire, un filtre qui devrait être omniprésent lors de la prise de décisions de la part des différentes instances universitaires. Il s’agit d’un savoir-être et d’un savoir-faire qui devraient transparaître dans l’offre de nos services auprès de nos étudiantes et étudiants, dans nos interactions entre employées et employés de nos trois campus et avec nos partenaires communautaires.

Vous êtes arrivé en poste en pleine période d’incertitude en raison de la pandémie de COVID-19. Comment percevez-vous la session d’automne pour les membres de la communauté universitaire ?

La situation que nous vivons présentement demande beaucoup de résilience et de patience de la part des membres de la communauté universitaire. Je suis impressionné par la capacité d’adaptation démontrée, à très court terme, de la part de nos étudiantes, étudiants, professeures, professeurs et membres du personnel administratif. Toutes et tous ont fait preuve de créativité, d’ingéniosité et d’humanité pour créer des stratégies qui assurent une certaine normalité et qui atténuent l’incidence de la pandémie sur la qualité de la formation et l’expérience universitaire. Bravo à toute l’équipe !

Quelle est votre définition du leadership et quelles sont vos priorités sur ce plan, en tant que recteur et vice-chancelier ?

Je me définis comme un leader collaboratif, consultatif et inclusif. Par ailleurs, comme en médecine, une fois que nous avons bien documenté la situation, nous devons en faire une analyse critique, prendre une décision, l’appliquer et évaluer son efficacité dans le temps. Il faut surtout ne pas avoir peur de réviser une décision si nécessaire. De plus, pour moi, tous les membres de la communauté universitaire et tous nos partenaires sont importants, et contribuent au développement et à la vitalité de notre université. Mon rôle consiste à mobiliser celles et ceux qui ont à cœur notre université en créant un espace pour qu’elles et ils y expriment librement leurs opinions, leurs suggestions et leur créativité. J’ai pour rôle de trouver les moyens de réaliser leurs rêves et leurs passions et de mettre en application leurs recommandations. C’est important pour moi de faciliter les discussions et les prises de décision, qui peuvent parfois être difficiles, pour le mieux-être de notre établissement. Enfin, le maintien d’un milieu de travail sain et respectueux, tout en s’amusant au travail, est pour moi l’un des éléments clés d’une université humaine.

« Le milieu universitaire doit non seulement développer et transmettre le savoir, mais il doit également favoriser les échanges et la confrontation d’idées. Pour moi, une communication efficace au moment opportun avec les bonnes personnes est un élément clé d’une organisation. »

Dr Denis Prud’homme

Votre poste vous mène à communiquer avec un grand nombre de personnes comme les étudiantes et étudiants, les membres du corps professoral, les personnes diplômées, les membres du personnel, les donatrices et donateurs, les rectrices et recteurs d’autres universités et la population en général. Comment abordez-vous ce type de responsabilité ?

J’ai grandi dans une famille de 12 enfants et la période du repas était pour nous un moment privilégié pour discuter de l’actualité. Nous n’étions pas toujours toutes et tous d’accord, mais nous faisions valoir nos points de vue sur les sujets qui nous intéressaient. De plus, discuter, c’est la raison d’être d’une université. Le milieu universitaire doit non seulement développer et transmettre le savoir, mais il doit également favoriser les échanges et la confrontation d’idées. Pour moi, une communication efficace au moment opportun, avec les bonnes personnes, est un élément clé d’une organisation.

Notre université doit relever de nombreux défis. Certains sont propres au milieu universitaire et d’autres à la mission généraliste de ce dernier. De quelle façon comptez-vous apporter des changements ou de nouvelles façons de faire afin qu’elle demeure une institution phare pour l’Acadie et la Francophonie ?

Au cours des prochains mois, nous devrons trouver des stratégies efficaces pour augmenter nos revenus, tout en minimisant nos risques, et pour diminuer nos dépenses. Une mise à jour des besoins en formation actuelle et future de la société acadienne et francophone s’impose, tout en préservant l’essence même du rôle social de l’université. Nous devrons également analyser et améliorer l’efficacité de notre structure ainsi que l’offre de nos programmes de formation et de nos services administratifs sur nos trois campus. En outre, nous nous devons de trouver des stratégies novatrices pour permettre à un nombre accru d’Acadiennes et d’Acadiens d’avoir accès à une formation ou à l’enseignement postsecondaire, et d’attirer d’autres étudiantes et étudiants francophones ou francophiles du Nouveau-Brunswick, du Canada et de l’international. Ces éléments feront partie des discussions dans le cadre de la planification stratégique 2020-2030.

Quelles sont les deux ou trois initiatives qui vous motivent le plus alors que vous commencez à peine votre mandat ?

J’ai pour objectif premier de rencontrer l’ensemble des membres de la communauté universitaire de nos trois campus. Plus je vais en apprendre sur les expertises et aspirations de nos professeures et professeurs, de nos administratrices et administrateurs et de nos partenaires, sur les attentes de nos étudiantes et étudiants, plus je vais être en mesure, avec mes collègues, de les aider à réaliser leurs rêves, leurs projets et nos objectifs collectifs.

Je veux également en apprendre davantage sur l’histoire, dont les défis de notre université en lien avec son mandat et sa mission, tout en tentant de déterminer les causes sous-jacentes aux succès et aux échecs de notre établissement. Je fais ici allusion à la Charte de l’université et aux facteurs qui ont influencé la trajectoire de la structure organisationnelle, des processus décisionnels, des politiques et procédures administratives et de la culture organisationnelle de l’université.

En terminant, comme vous avez passé la majorité de votre carrière au Québec et en Ontario, quelle a été votre première impression de l’Acadie à votre arrivée parmi nous ? Parlez-nous un peu de vos premiers moments au Nouveau-Brunswick et de votre accueil dans la région.

Je suis souvent venu en vacances au Nouveau-Brunswick. J’ai toujours apprécié la joie de vivre des gens d’ici ainsi que les plages et les parcs pour y faire de la randonnée. J’adore mes nouveaux pénates puisque je demeure tout près des pistes de marche et de bicyclette. C’est le paradis pour un adepte d’activités en plein air comme moi.

J’ai aussi grandement aimé l’accueil chaleureux et le respect de mes collègues et des membres de la communauté universitaire.

Il est évident, à mes yeux, que les membres de la communauté, nos diplômées et diplômés, nos employées et employés et nos étudiantes et étudiants ont à cœur le succès et la vitalité de leur université. Je tiens à les remercier pour leur confiance, leur soutien et leur collaboration. Je suis persuadé qu’ensemble, nous serons en mesure de relever nos défis avec brio et de lancer notre université vers de nouveaux sommets pour poursuivre la vision de mes prédécesseurs et répondre aux attentes et aux aspirations des Acadiennes et Acadiens.


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