Entretien

avec le recteur et vice-chancelier, Dr Denis Prud’homme

L’Université de Moncton a lancé, en janvier dernier, Cap sur l’avenir, sa nouvelle stratégie 2023-2028 qui agira comme guide pour mieux positionner l’Université comme la référence en matière de transformation des sociétés dans une perspective d’inclusion, d’innovation et d’écoresponsabilité. Le magazine ALLUMEZ a voulu faire le point sur ce dossier prioritaire avec le recteur et vice-chancelier Dr Denis Prud’homme.

Comment avez-vous trouvé l’exercice qui a mené au lancement de la nouvelle stratégie institutionnelle? Quelle est votre plus grande satisfaction à l’égard de cette démarche?

Tout d’abord, il faut savoir que la mise au point et le déploiement d’une stratégie au sein d’une université sont un exercice unique en son genre! Les attentes et les enjeux sont divers et variés tant pour la population étudiante que pour l’ensemble de notre personnel. Elle l’est aussi de façon plus globale pour la société au sein de laquelle nous évoluons en tant qu’Université acadienne et de langue française qui œuvre dans un contexte linguistique minoritaire.

La clé du succès est d’être à l’écoute de toute cette belle communauté! C’est cette démarche participative et collaborative qui est ma plus grande satisfaction. Nous avons tenu plusieurs ateliers avec différents auditoires et de nombreux collaborateurs, ce qui nous a permis d’arriver aujourd’hui avec une stratégie qui nous rassemble, une vision, des valeurs, des cibles et filtres stratégiques et des objectifs pour chacun de nos cinq chantiers que nous avons en commun.

Qu’est-ce qui, à votre avis, caractérise cette nouvelle stratégie? Ses points forts?

Son principal point fort, c’est qu’elle est le reflet de ce qui a découlé des consultations et donc, bien entendu, des personnes qui composent la communauté universitaire, son corps professoral, ainsi que ses employés professionnels, techniques, de soutien administratif, d’entretien, de réparation et sa population étudiante.

Nous avons aussi intégré ce que nous avons entendu des rencontres avec les personnes de la communauté civile de partout dans la province et spécialement celles des régions de nos trois campus. La volonté de s’ancrer plus que jamais dans nos communautés est sans aucun doute un deuxième point fort. Nos anciennes étudiantes et anciens étudiants ainsi que nos partenaires ont révélé un désir profond que l’Université de Moncton soit encore plus présente sur le terrain pour appuyer les efforts et les activités des communautés. Nous voulons par ailleurs ouvrir nos campus à la communauté pour faire profiter notre population étudiante des expertises au sein de la communauté civile. Je pense que notre chantier Communautés est le reflet de notre désir de transformer l’Université en ce sens.

La volonté de maximiser les expertises déjà présentes dans notre réseau universitaire est une autre caractéristique. Nous faisons certaines opérations et activités en triple. Nous pouvons mieux mobiliser nos ressources (humaines et matérielles) au sein du réseau pour répondre à de nouveaux besoins sans avoir à en ajouter de nouvelles. C’est une force qu’on pourrait qualifier de dormante.

À la lumière des nombreuses consultations qui ont été menées, quels sont les principaux défis que doit relever l’Université de Moncton pour assurer sa mission?

Il y a d’abord des défis de société. La vision de l’Université y fait allusion implicitement. La société acadienne se transforme et nous voulons être là, avec elle, en ce qui concerne les défis liés à l’inclusion, à l’innovation et à l’écoresponsabilité. L’Acadie est plus que jamais plurielle. Des familles de partout au Canada et de l’international viennent s’y établir. Beaucoup fréquentent l’Université de Moncton. Nous jouons un rôle important pour favoriser leur intégration et leur rétention ici dans le but d’assurer la survie de l’Acadie et de la langue française. Dans un contexte de diminution de la présence francophone, de rareté de main-d’œuvre professionnelle et de changements climatiques, nous devons être aux premières loges de l’innovation.

Il y a ensuite les défis internes. Les pressions financières, qui touchent l’ensemble de la société et les universités, en particulier depuis les 10 à 15 dernières années, de même que les grandes transformations du secteur de l’emploi, de l’éducation postsecondaire et de l’offre variée de programmes de formation. Tous ces défis nous poussent à être plus créatifs, plus agiles et plus efficaces dans l’offre de nos programmes de formation et de recherche et dans la mobilisation de nos ressources. Nous pouvons compter sur une présence bien ancrée dans les trois grandes régions francophones du Nouveau‑Brunswick. Il nous faut davantage tirer profit des ressources au sein de notre réseau!

Comment l’Université de Moncton peut-elle se démarquer au sein de l’offre de formation postsecondaire?

La taille de l’Université de Moncton est l’une de ses plus grandes forces. Nous profitons d’un ratio professeur-étudiant parmi les plus bas au pays, ce qui constitue un avantage sur lequel nous misons dans cette stratégie. Notre corps professoral doit recourir à des approches pédagogiques qui permettent de tirer profit de ce ratio très favorable au développement de la créativité et de l’engagement de nos personnes étudiantes. À ce sujet, nous sommes sur la bonne voie, car un sondage du Consortium canadien pour la recherche auprès d’étudiants universitaires de première année révèle entre autres que 92 % des étudiantes et étudiants rapportent que « l’Université de Moncton atteint ou dépasse leurs attentes! » (Sondage mené en 2022).

Cap sur l’avenir 2023-2028 se déploie en cinq chantiers (Milieu de vie, Talents, Enseignement et Recherche-Développement-Création, Communautés, Leadership organisationnel), comment allez-vous établir les priorités institutionnelles?

Lors des nombreuses rencontres de consultation qui ont mené à la stratégie, nous avons recueilli des centaines d’idées d’actions. Il s’agit d’une manne d’information provenant de tous les niveaux de l’Université ainsi que de la communauté civile de l’ensemble de la province. Nos unités, sur nos trois campus, ont participé à un exercice d’établissement des priorités duquel sont ressortis des objectifs plus précis à la fois pour eux et pour l’Université dans son ensemble. Le 10 juin, j’aurai l’honneur de présenter le plan opérationnel institutionnel aux membres du Conseil de l’Université. Ce plan servira à déterminer les grandes actions à entreprendre à court et moyen terme. Il servira aussi de guide pour que les unités déterminent leurs actions, toutes en lien avec le plan opérationnel institutionnel. Cette approche favorise la convergence de nos actions et l’atteinte de nos critères de succès pour chacun de nos cinq chantiers.

Quelles sont les prochaines étapes dans la mise en œuvre de la stratégie?

Depuis l’adoption de la stratégie à la fin janvier, notre équipe a travaillé sur le plan opérationnel institutionnel. Toutefois, plusieurs actions proposées ont déjà été entamées ou seront bientôt initiées, à titre d’exemple le plan de modernisation de notre service des ressources humaines, le plan d’action climatique et le plan des risques institutionnels. De plus, les unités (campus, facultés et services) doivent désormais produire leurs plans opérationnels qui indiqueront les actions qu’elles doivent faire, à leur niveau, afin de déployer la stratégie. L’objectif, pour les unités, consiste à faire correspondre leurs priorités à celles de la stratégie en prévision de l’exercice budgétaire de l’an prochain et des années subséquentes.

La réflexion qui émane de la communauté concernant le nom de l’Université de Moncton a-t-elle une incidence sur la stratégie?

Cette réflexion montre clairement à quel point la communauté tient à l’Université de Moncton. Du côté du Conseil de l’Université, de l’équipe de direction et de l’ensemble de la communauté universitaire, nous nous devons d’être à la hauteur des attentes de la communauté envers l’Université, ce qui comprend de répondre avec sérieux à cette question identitaire.

La stratégie a permis d’établir deux cibles inséparables. Elles sont – ensemble avec les objectifs de chacun des cinq chantiers – notre étoile polaire. Toutes les actions que nous faisons depuis l’adoption de la stratégie, et celles à venir, doivent nous permettre d’accroître l’attractivité de l’Université et de catalyser la transformation du Nouveau-Brunswick, de l’Acadie et de la Francophonie. Le Conseil de l’Université a décidé d’étudier la question en tentant d’abord de cerner tous les effets d’un changement ou non du nom d’une Université. La stratégie agira comme filtre dans l’examen de cette question.

Au cours de la prochaine année, l’Université de Moncton célébrera son 60e anniversaire de fondation. Comment entrevoyez-vous l’avenir de l’institution?

Aujourd’hui, en raison de la stratégie, nous avons des leviers pour transformer l’Université et assurer notre avenir en garantissant l’accessibilité aux études postsecondaires pour les francophones. Cette feuille de route nous permettra de développer notre signature UMoncton : des personnes diplômées créatives et engagées, ce qui nous permettra de devenir la référence en matière de transformation des sociétés dans une perspective d’inclusion, d’innovation et d’écoresponsabilité.

Difficile de prédire l’avenir, mais pour les prochaines années, je suis sûr d’au moins une chose : nous regarderons tous vers la même direction qu’est notre vision, et incarnerons au quotidien notre mission et nos valeurs!

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