La passion de toute une vie pour la cognition sociale
Tout au long de ses études en psychologie et durant toute sa carrière, Annie Roy-Charland (B. Psy. 2000; M. Psy. 2002; Ph. D. Psy. 2007) s’est passionnée par la cognition sociale. Son profond désir d’aider les gens par l’entremise de la psychologie s’est alors exprimé dans de nombreux projets de recherche sur ce thème.
« Quand j’ai commencé mes études initialement, ce qui m’intéressait était la relation d’aide. Je voulais devenir psychologue pour aider les gens, puis au cours de mon parcours, j’ai développé un intérêt pour la recherche. Aider les gens part de la recherche. Tous les concepts, toutes les interventions en psychologie sont basés sur la science et des données probantes », explique-t-elle.
En d’autres mots, cette chercheuse s’intéresse aux façons dont le cerveau humain traite l’information dans différents contextes sociaux et elle a choisi cette avenue de recherche pour aider les autres.
Un retour aux sources
Originaire d’Edmundston, Annie Roy-Charland a effectué toute sa scolarité à l’Université de Moncton, du baccalauréat jusqu’à l’obtention de son doctorat. Elle a occupé un poste de professeure à l’Université Laurentienne pendant dix ans, avant de revenir à son alma mater en 2017. Elle confie que son intérêt pour la recherche avait tout d’abord été alimenté par son superviseur de thèse de maitrise et de doctorat, le professeur Jean Saint-Aubin, qui est aujourd’hui un collègue de travail.
Un laboratoire des plus dynamiques
La professeure-chercheure s’occupe du laboratoire de cognition sociale de l’École de psychologie. Elle y gère cette année une équipe de 29 personnes étudiantes inscrites au baccalauréat, à la maitrise et au doctorat. Les projets de recherche sont fort variés et peuvent toucher à la psychologie positive et la gratitude dans un contexte social ou bien aux différences culturelles et les expressions faciales. D’autres étudiantes et étudiantes s’intéressent au bilinguisme, à la communauté LGBTQ2+ ou encore aux processus visuels pour identifier les émotions de base.
Le dévouement de la professeure Roy-Charland pour accompagner les jeunes chercheuses et les jeunes chercheurs a d’ailleurs fait l’objet d’une reconnaissance sur la scène nationale. Elle a reçu le prix de mentorat 2022 des femmes en sciences cognitives. Ce prix honore une personne scientifique canadienne qui a fait preuve de mentorat efficace et soutenu auprès d’étudiantes, qui a servi de conseiller ou de conseillère en recherche ou qui a supervisé une ou plusieurs étudiantes et qui est allé au-delà des activités de mentorat habituel.
Dans ses projets de recherche personnels, elle s’attarde particulièrement au décodage des expressions faciales. « Je m’intéresse à comment les autres décodent ces signes. Quels sont les signes du mensonge sur le visage ? On laisse échapper des traces de nos émotions quand on dit des mensonges, alors est-ce que les autres y sont sensibles ? »
Elle utilise notamment des appareils de mesure des mouvements oculaires pour déterminer avec précision où se dirige un regard. Ses sujets de recherche examinent des photos ou visionnent des enregistrements pendant que ces appareils détectent avec précision où se pose exactement leur regard sur l’écran à chaque milliseconde.
Mentionnons que ses travaux sur les expressions faciales émotionnelles sont subventionnés par le Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada.
Un livre pour aider les enfants à décoder les émotions
Les projets de recherche de Annie Roy-Charland se distinguent par leur applications pratique au service de la communauté. Elle a publié en 2019 le livre « Les émotions, comment mieux les expliquer », avec des collègues de l’Université de Moncton et de l’Université Laurentienne, Jacques Richard et Mélanie Perron.
Cette équipe de recherche avait noté que beaucoup d’efforts sont généralement investis dans la préparation académique et scolaire, mais que très peu d’outils existaient pour la préparation émotionnelle des enfants avant leur entrée à l’école.
Ce premier livre s’adresse aux enfants francophones de 3 à 12 ans. Toutefois, les commentaires recueillis parmi le groupe d’âge le plus vieux pendant les études de validation ont révélé que les histoires leur semblaient trop enfantines. Mme Roy-Charland et ses collègues ont donc conçu un volume 2 qui s’adresse aux enfants de 8 à 12 ans avec un volume 3 en préparation pour aborder les émotions dans un contexte d’intimidation.
La publication et la diffusion gratuite de ces livres ont été rendues possibles par le financement de Santé Canada par l’entremise du Consortium national de formation en santé.
« Quand on regarde la littérature scientifique, on sait que les enfants qui sont mieux préparés et qui ont les meilleures compétences émotionnelles à leur rentrée scolaire ont plus de facilités à s’adapter au milieu scolaire et à faire des gains scolaires. On voit des effets directs sur leur performance. »
Annie Roy-Charland
Un point d’entrée pour la recherche avec les communautés LGBTQ2+
Par ailleurs, Annie Roy-Charland codirige le Pôle de recherche interdisciplinaire sur les diversités et l’équité (PRIDE) de l’Université de Moncton avec le professeur Roger G. LeBlanc de l’École de kinésiologie et de loisirs.
« Nous nous étions rendu compte il y a quelques années que plusieurs personnes en recherche à l’Université de Moncton s’intéressaient aux questions de l’équité et de la diversité pour les communautés LGBTQ2+. D’une part, PRIDE les rassemble sous un même parapluie et, d’autre part, nous pouvons y partager nos idées et être un point d’entrée pour la recherche communautaire. »
Le pôle de recherche a développé des partenariats avec Acadie Love ou encore Alter Acadie pour mener quelques projets. Par exemple, une étude s’intéressera prochainement aux personnes aînées LGBTQ2+ dans les foyers de soins.
Par l’entremise de PRIDE, des personnes étudiantes en psychologie ont reçu une formation spécialisée pour fournir la documentation nécessaire dans le processus des personnes trans qui veulent obtenir une chirurgie. Le groupe a également compilé une liste des ressources disponibles dans les écoles de la province pour les communautés LGBTQ2+ et publié un guide de base sur le respect de la diversité sexuelle et romantique, de la pluralité des genres et de la diversité des sexes.
Quel que soit son projet de recherche, Annie Roy-Charland s’efforce donc de développer des outils ou des connaissances reliées à la cognition sociale qui peuvent être mises au service de la communauté.