Gabriel Robichaud

Baccalauréat en art dramatique 2011

Récipiendaire du

Prix Émergence 2023

L’alUMni est fière d’avoir remis, lors de la Soirée Ovation en octobre dernier, le prix Émergence 2023 à Gabriel Robichaud.

Diplômé en art dramatique de l'Université de Moncton, l'artiste multidisciplinaire a connu une ascension fulgurante dans le milieu artistique acadien, canadien et international. Il se distingue par l’excellence qui caractérise sa démarche artistique et par sa contribution à promouvoir la richesse des arts et la culture.

Gabriel Robichaud est né à Moncton et a grandi à Dieppe. Comédien de formation, il est aussi poète, chanteur, écrivain et dramaturge. Poète flyé du Festival Frye de Moncton de 2011 à 2013, il compte à son actif cinq publications, soit trois recueils de poésie et deux pièces de théâtre, et il participe à divers projets de revue, collectifs et inédits.

Sur scène, on a pu voir le comédien dans plus d’une douzaine de production théâtrales et dans divers événements littéraires. À la télévision, il a été de la distribution de la série À la Valdrague et des Newbies. Il a également joué dans la production de l’ONF, L’Ordre secret du réalisateur Phil Comeau.

En 2017, il a participé aux Jeux de la francophonie à Abidjan, en Côte d'Ivoire, où il a remporté la médaille d'argent en littérature. Il y sera aussi le porte-drapeau du Nouveau-Brunswick.

Il a été colauréat du Prix national d’excellence RBC – artiste émergent.e de la Fondation pour l’avancement du théâtre francophone au Canada; récipiendaire du prix Champlain du Conseil de la vie française en Amérique pour Acadie Road et du Prix littéraire Le Droit pour Le lac aux deux falaises. En 2016, il a reçu le Prix Éloizes comme artiste de l'année en littérature, pour Les Anodins.

Félicitations pour votre prix Émergence. Que représente cette reconnaissance pour vous?

Recevoir le prix Émergence de L’alUMni a été vertigineux. Au moment de faire mon bac en art dramatique, Wajdi Mouawad, qui était venu faire une conférence au Studio-théâtre La Grange, avait évoqué, dans une remarquable image, qu’une carrière artistique, c’était comme naviguer un bateau en mer. Le plus grand défi, c’est de constamment regarder le trajet devant sans se préoccuper de la broue générée derrière. Le paradoxe d’un prix rétrospectif comme celui-ci, c’est qu’il ramène inévitablement à cette broue. Je le perçois à la fois comme une marque d’estime de ladite broue, mais surtout comme un vote de confiance, un vent dans le dos qui souffle « continue de mener ce bateau à bon port ».

Quelle résonance a pour vous l’Université de Moncton?

Du plus loin que je me souvienne, l’Université de Moncton a toujours fait partie de ma vie. Je suis né alors que mon père complétait son MBA à quelques pas d’ici, et ma mère a consacré l’essentiel de sa vie professionnelle entre ses murs. Pour moi, l’Université de Moncton, c’est à la fois apprendre à patiner sur la glace de l’Aréna J.-Louis-Lévesque, manger des peanuts aux Aigles Bleus, louer des livres au Centre de ressources pédagogiques, apprendre à nager au CEPS, faire partie du club de natation Bleu et Or, au secondaire, nager au club Natation Edmundston durant mes années à Saint-Jacques, être spectateur aux shows du service des loisirs socioculturels, aux matchs d’improvisation de la LICUM, aux productions des finissantes et finissants au Studio-théâtre La Grange, les soirées Ciné-campus à l’amphithéâtre de Jacqueline-Bouchard, la Soirée internationale, scruter le ciel avec le télescope à Taillon, sans compter les activités scolaires qui m’ont mené sur les trois campus en grandissant.

« Du plus loin que je me souvienne, l'Université de Moncton a toujours fait partie de ma vie. »

Gabriel Robichaud

Comment s’est posé votre choix sur des études en art dramatique? Est-ce que cela a été un choix facile?

Pour moi, c’était le seul choix qui s’imposait. Mes parents ont joué leur rôle de parents de s’inquiéter, j’ai joué celui d’adolescent de s’indigner. En même temps, leurs questions m’ont forcé à trouver des réponses qui me convenaient. Je les vois aujourd’hui non pas comme un frein, main un outil d’émancipation, d’autant que devant ma détermination, ils ont fait le choix de me suivre. Bénéficier de leur soutien indéfectible au fil du temps est quelque chose de fort précieux.

Au niveau scolaire, ça a été plus ardu. Certaines personnes d’influence ont questionné mon choix, notamment parce que je réussissais bien académiquement et que j’étais du programme du baccalauréat international. On m’a même parlé d’aller « gaspiller mon intelligence » en art dramatique. Ces voix n’ont pas eu de poids dans ma décision, heureusement, mais elles m’ont éclairé sur les perceptions négatives dont bénéficient toujours ma profession et mon milieu auprès d’une part de la population.

Quels sont les principaux enjeux d’être artiste en 2023?

On parle souvent du défi de percer un milieu. J’y ai longtemps cru, mais avec le temps, je constate que le défi principal est de durer. Le manque de pérennité du financement, le manque de vision de nombre de décideurs, le défi constant de se renouveler, l’épuisement professionnel, peuvent constituer des freins importants. On a, à mon sens, la fausse perception qu’aimer son emploi enlève une charge de travail. Pour ma part, avec ma profession, s’il n’y a pas d’amour de ce que l’on fait, l’effort que ça demande n’en vaut tellement pas la peine.

Vous excellez dans plusieurs disciplines artistiques, est-ce facile de réconcilier toutes vos passions?

Pour moi, c’est assez simple. L’interprétation demeure ma passion première, et tout découle de ça. Même quand j’écris, il y a toujours eu une pensée pour l’interprétation, que ce soit en poésie, au théâtre, en chanson ou plus récemment pour les médiums audiovisuels. Le défi semble être plus de faire comprendre le tout aux gens. Le fait qu’on m’ait connu sur la place publique, comme poète d’abord, m’a donné du fil à retordre au départ. Je ne voulais pas n’être que ça aux yeux des gens. Cela étant, il y a des choses qu’on ne contrôle pas.

Après avoir mené votre carrière artistique dans différentes villes du pays, vous avez fait le choix de revenir vous établir en Acadie en 2018. C’était important pour vous?

J’ai dû partir quelque temps accomplir ailleurs des choses que je ne pouvais accomplir qu’ailleurs, et me rendre compte que là où je percevais des limites ici se dissimulait souvent une série de possibles à inventer sans qu’on les soupçonne. C’est de ses possibles que j’ai eu envie quand je suis revenu. Mon parcours a été jalonné de routes à prendre, mais pour moi, tout est clair aujourd’hui. En résumé, tout part d’ici. Et quand je prends la route, c’est à partir d’ici que je la prends, et quand j'ai à revenir, c'est toujours ici que je reviens, parce que c'est ici que c’est le plus significatif. Pour certains, l’Acadie est une périphérie des centres. Pour moi, c’est un centre qui est en train de se créer, et c’est le défi de plusieurs vies auquel je souhaite plus que tout apporter une contribution.

L’engagement est au cœur de votre parcours personnel et professionnel. Est-ce qu’il y a un dénominateur commun à vos actions?

Je dirais, avant tout, un désir de légitimité et d’affranchissement de l’Acadie d’aujourd’hui, de ce qu’elle crée de pertinent (ou d’impertinence pertinente) au quotidien, et dont on ne perçoit pas toujours la force dans nombre de sphères. Que ce soit ici ou ailleurs, c’est à partir de là que j’agis ou réagis. C’est aussi avec le même regard que je me trouve une parenté avec d’autres enjeux sociaux ailleurs dans le monde.

Que peut-on vous souhaiter pour l’avenir?

De continuer de créer et de rayonner à partir d’ici. Que cet ici se donne les moyens de la formidable ambition et créativité dont il est à l’origine. Puis d’arriver à durer, ou de savoir quand céder sa place.

Le prix Émergence

Institué en 2008, le prix Émergence récompense une personne diplômée de l'Université de Moncton, âgée de 35 ans ou moins, qui se démarque par son sens du leadership, ses réalisations dans sa carrière naissante et sa contribution à la société.

La période de mise en candidature pour les Prix d’excellence 2024 de L’alUMni sera lancée à la fin février 2024.

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